FRANÇAIS
Le comparatisme est une activité scientifique qui a cours depuis bien longtemps. Dans les années 1960, Pierre Brunel, Claude Pichois et André-Marie Rousseau écrivent que “ la littérature comparée est l’art méthodique, par la recherche de liens d’analogie, de parenté, et d’influence, de rapprocher la littérature des autres domaines de l’expression ou de la connaissance, ou bien les faits et les textes littéraires entre eux, distants ou non dans le temps ou dans l’espace, pourvu qu’ils appartiennent à plusieurs langues ou plusieurs cultures, fissent-ils partie d’une même tradition, afin de mieux les décrire, les comprendre et les gouter ” (La littérature comparée, A. Colin, 1967, p. 174).
Quoique certains critiques estiment que la littérature comparée, de par la vaste étendue de ses intérêts, est prétentieuse et que d’autres la déclarent désuète et même révolue (comme Susan Bassnett dans Comparative Literature : A Critical Introduction, 1993, p. 47), dans les années 1990 une nouvelle ligne de défense de ce champ de recherche s’est cristallisée. Ainsi, Didier Soulier et Wladimir Troubetskoy soutiennent que “ La littérature comparée peut […] fournir une excellente propédeutique à la découverte de l’autre, en aidant à prendre conscience des problèmes de communication et de compréhension qu’impliquent confrontation et comparaison.[…] Comparer c’est voyager, au sens immédiat, puisque l’ouverture littéraire sur d’autres œuvres ne peut s’achever que par une découverte du pays concerné et de sa civilisation ” (Littérature comparée, Presse Universitaires de France, 1997, Introduction xvi).
Dans le même ordre d’idées, Steven Totosy de Zepetnek écrivait que “Comparative Literature means the knowledge of more than one national language and literature, and/or it means the knowledge and application of other disciplines in and for the study of literature and second, Comparative Literature has an ideology of inclusion of the Other, be that a marginal literature in its several meanings of marginality, a genre, various text types, etc. […] Comparative Literature has intrinsically a content and form, which facilitate the cross-cultural and interdisciplinary study of literature and it has a history that substantiated this content and form. Predicated on the borrowing of methods from other disciplines and on the application of the appropriated method to areas of study single-language literary study more often than tends to neglect, the discipline is difficult to define because thus it is fragmented and pluralistic”(Steven Tötösy de Zepetnek, Comparative Literature: Theory, Method, Application Amsterdam/Atlanta: Rodopi, 1998: 13).
La littérature comparée n’est point une affaire de comparaison de littératures ou de cultures; elle est plutôt un moyen multidisciplinaire qui défie le cloisonnement de l’épistèmê, indice de la disciplinarisation des détenteurs du savoir, afin de créer la liberté d’aller découvrir la différence (culturelle, religieuse, “ raciale », etc.) que certaines civilisations posent en ennemis, et qui à défaut d’être domptée, doit être mis au rebut par elles. Ce champ de recherche s’est mue en un lieu de formation de ce que les postcolonialistes appellent “ agency” (agencéité ou agenciveté) dont l’objectif est d’aboutir à un système de valeurs basé sur le droit à la différence dans notre monde globalisé où l’altérité est prise d’assaut d’attaques constantes par les défenseurs de la pensée unique et de la culture totalisante. C’est pourquoi, plus que jamais, il est impératif de convoquer des regards aussi bien dans le dehors que dans le dedans, regards croisés et porteurs d’expérience(s) qui traduisent la transculturalité (phénomène du passage d’une culture à l’autre) et/ou la diversité culturelle (ou multiculturalité), des modes contribuant à l’avènement d’un monde où la coexistence culturelle pacifique n’est pas un mirage, mais un rêve prêt à se concrétiser.
La pluralité culturelle, pour la plupart, se fonde sur les efforts de compréhension vis-à-vis de l’Autre. C’est bien la diversité, ce que notre âge a de particulier, que la revue Cahiers Ivoiriens d’Études Comparées (CIEC) / Ivoirian Journal of Comparative Studies (IJCS) se propose de repenser.
Basés à l’Université Félix Houphouët-Boigny à Cocody-Abidjan, la revue CIEC/IJCS se veut un espace où les chercheurs exposeront leurs contributions interdisciplinaires et/ou multidisciplinaires sur les sujets de littérature, langue, culture (matérielle), histoire, sociologie, les formes d’art (musique, peinture, film, etc.) et de philosophie parmi tant d’autres.
Les contributions auxquelles CIEC s’attend doivent être pluridisciplinaires. Elles doivent porter sur les questions et/ou problématiques qui sont importantes pour notre âge. Bref, elles doivent refléter primordialement cette tâche académique qui consiste à réduire à zéro les élans d’homogénéisation se profilant derrière certains desseins voilés de l’impérialisme et de ses avatars.
De plus, parce que la revue CIEC s’évertue à promouvoir le travail des chercheurs africains au-delà des frontières de leurs pays, elle consacrera une rubrique aux comptes rendus de livres traitant des sujets d’ordre comparatiste, multidisciplinaire et interculturel, entre autres.
S’inscrivant au diapason des recherches scientifiques sérieuses et de qualité en littérature et culture du monde, la revue CIEC paraîtra deux fois par an. Des numéros spéciaux paraitront lorsque le besoin s’imposera. Enfin, la littérature comparée se voulant un carrefour de langues, les articles de CIEC peuvent être en anglais, en français, en allemand et en espagnol.
ENGLISH
Comparative literature, and by extension comparative studies (or compartism), has been around for some time now. In the 1960s, Pierre Brunel, Claude Pichois and André-Marie Rousseau attempted to define the field. They write, “comparative literature is a methodical means that, through research by analogical connections and parentage, and influences, helps connect texts from different fields of expression or knowledge, or to connect facts and literary works to one another whether they are closely or remotely linked, provided that they belong to several languages or cultures, possibly from the same culture, in order to better describe, understand and taste them” [our translation] (La Littérature comparée, A. Colin, 1967, p. 174).
Although some critics may believe that comparative literature to is too pretentious in scope and others, like Susan Bassnett, consider it to be dead (Susan Bassnett, Comparative Literature: A Critical Introduction, 1993, p. 47), in the 1990’s a new line of defense for the field has been formed. Thus, Didier Soulier and Wladimir Troubetskoy write, “Comparative Literature may […] allow for a venue for the discovery of the Other through sensitizing people about the deficit of communication and understanding, which entail confrontation and comparison. […]. To compare is to travel around in the truest sense of the word because the literary overture to other works only leads to the discovery of the country and civilization whence the work orginates” [Our translation] (Littérature comparée, Presse Universitaires de France, 1997, Introduction xvi). In the same vein, Steven Totosy de Zepetnek writes, “Comparative Literature means the knowledge of more than one national language and literature, and/or it means the knowledge and application of other disciplines in and for the study of literature and second, Comparative Literature has an ideology of inclusion of the Other, be that a marginal literature in its several meanings of marginality, a genre, various text types, etc. […] Comparative Literature has intrinsically a content and form, which facilitate the cross-cultural and interdisciplinary study of literature and it has a history that substantiated this content and form. Predicated on the borrowing of methods from other disciplines and on the application of the appropriated method to areas of study single-language literary study more often than tends to neglect, the discipline is difficult to define because thus it is fragmented and pluralistic”(Steven Tötösy de Zepetnek, Comparative Literature: Theory, Method, Application Amsterdam/Atlanta: Rodopi, 1998: 13).
Comparative Literature is therefore not a mere business of comparison of literatures and cultures around the world in view of unearthing similarities that connect them. It is a multidisciplinary means of deconstructing the rationales behind the disciplinarization of the episteme, knowledge, such as is the case in the academia in view of allowing free movement towards difference, be it cultural, religious or racial among others. The field has morphed into an agency-generative site aiming at creating a value system based on difference in our globalized world where alterity is assaulted upon by one-dimensional thought and totalizing/dominating cultures. More than ever, it is imperative that crosscutting and actually comparative gazes, both from inside and outside, be cast upon our time and our shared experience in order to translate their transculturality and their diversity, which are modes that contribute to the coming of age of a new world where peaceful co-existence of cultures.
In order to rethink cultural diversity, which for the most part, hinges on attempts to understand the Other, we have created The Ivorian Journal of Comparative Studies (IJCS), a peer-reviewed journal which shows as a space par excellence for scholars to contribute their interdisciplinary opinions in literatures, cultures, (hi-)stories, art forms (music, painting, film, etc.) and philosophy among others across the globe. Based at the Université Félix Houphouët-Boigny at Cocody-Abidjan, the IJCS seeks to promote earnest and responsible scholarship of researchers beyond the boundaries of their countries. We therefore invite scholars to submit article contributions about issues and concerns of our time, as long as these contributions are framed in a comparative / multidisciplinary perspective in order to translate the academic attempts to debunk homogenizing drives lying behind some veiled imperialist moves and their avatars.
Because the IJCS hail from the African continent, the journal hosts a section for book and film reviews. We particularly place an emphasis of African-authored books as well as books about the continent in order to reveal young and senior scholars whose works are in alignment with the vision of our journal. The IJCS will publish two issues a year. Special issues will be published when the need arises.
Ultimately, because comparative literature is a crossroads where various languages meet, it will accept contributions in French and English, although contributions in German and Spanish may be published depending on their relevance.